Noel Jean Jean-Jacques

Noel Jean Jean-Jacques
Doctorant
Email: jeanjacques.noeljean@univ-grenoble-alpes.fr
Thèmes de recherches:Violences interpersonnelles en milieu carcéral, processus de régulation émotionnelle et mécanismes de coping, santé mentale au travail des surveillants pénitentiaires.
PrésentationAxes de recherchePublicationsCV

Directrice de Thèse : Christine JEOFFRION

Codirectrice : Valérie MOULIN

Sujet : Exposition aux violences interpersonnelles en milieu carcéral et santé mentale au travail des agents : une étude intégrative des facteurs de vulnérabilité et de protection des surveillants pénitentiaires.

Résumé

Un niveau élevé d’exposition des agents pénitentiaires aux situations de violences interpersonnelles a été observé à travers différents systèmes pénitentiaires (Isenhart & Hostettler, 2020 ; Lerman, Harney & Sadin, 2022). L’exposition à la violence toucherait le plus souvent le personnel de garde ou ceux qui sont en détention comparés aux agents occupant d’autres postes (périphériques, fixes). Le risque d’être exposé à une agression (physique, verbale) serait plus élevé parmi les surveillants qui ont des contacts fréquents avec les détenus (Ghaddar et al., 2011 ; Jaegers, 2012), ainsi l’imprévisibilité et la proximité obligée aux personnes détenues ont été considérées comme l’une des sources de stress chronique dans le métier de surveillant pénitentiaire (Brower, 2013 ; Moulin & Sévin, 2012).

Exposés à la chronicité des relations interpersonnelles violentes, les professionnels ne sont pas pourtant également vulnérables au développement du Trouble de Stress Post-Traumatique (TSPT) ou du burnout, à l’absentéisme ou au désir de quitter la détention (Harney & Lerman, 2021 ; Taylor & Swartz, 2021). S’intéressant aux facteurs qui pourraient influencer la relation entre l’exposition à la violence en milieu carcéral et la santé mentale des professionnels, des travaux ont montré le rôle du sexe, du sentiment de sécurité, du type d’établissement, du soutien social familial, de l’expérience ou de l’âge, dans la relation entre le contexte de travail (dont les agressions par les détenus) et l’épuisement professionnel, l’absentéisme, le trouble de stress post-traumatique (Boudoukha et al., 2011 ; Isenhart & Hostettler, 2020 ; Lavigne & Bourbonnais, 2010). Sans forcément s’intéresser aux déterminants des mécanismes de coping tels qu’ils ont été démontrés dans d’autres domaines (Rascle & Irachabal, 2001), quelques études ont montré que l’adoption de certains styles de coping tels que ceux dits passifs, était positivement associée à des problèmes de santé des agents (Harney & Lerman, 2021 ; Taylor & Swartz, 2021).

Toutefois, la plupart de ces études ne portent pas spécifiquement sur le lien entre ces problèmes en matière de santé et l’exposition des agents pénitentiaires à la violence. Et lorsque c’est le cas, il n’est pas rare de constater une certaine variabilité dans la définition ou le type de violence considéré (Brie & Rambourg, 2022), ce qui explique probablement le fait que les outils utilisés pour mesurer les violences en milieu carcéral varient d’un auteur à l’autre et d’un pays à l’autre. Ainsi se dresse-t-il une difficulté majeure à la généralisation des résultats sur l’articulation entre le fait d’être exposé aux violences interpersonnelles en milieu carcéral (VIMC) et les résultats en termes de problèmes de santé des agents. Particulièrement, les connaissances sur les facteurs psychosociaux et environnementaux qui pourraient protéger les surveillants lors des situations de VIMC restent limitées. Il manque encore de connaissance sur la prévalence et le caractère dynamique des VIMC en contexte pénitentiaire français, la nature de la relation éventuelle entre les styles de coping en situation de VIMC et le développement de problèmes de santé, ainsi que les facteurs individuels et environnementaux qui sont à même d’influencer les mécanismes de coping mis en place par les surveillants pour faire face aux stress liés à l’exposition aux situations de VIMC.

Notre travail de thèse a pour ambition de combler ces lacunes qui existent dans la littérature nationale et internationale par une approche intégrative, dynamique et interpersonnelle de la violence en milieu carcéral et un examen de la relation entre l’exposition aux situations de VIMC et la santé mentale au travail des agents en contexte pénitentiaire français. Utilisant une méthodologie mixte de recueil et d’analyse de données, nous examinerons le niveau d’exposition des surveillants aux situations de VIMC (prévalence) en articulation avec les données sur les symptômes liés à la santé mentale au travail des agents. Le rôle des mécanismes de coping dans cette relation sera aussi précisé lors d’une analyse multiniveau. Seront aussi explorés les facteurs individuels, mais aussi environnementaux tels que les compétences des agents pénitentiaires en matière de régulation émotionnelle et le niveau de soutien social au travail qu’ils perçoivent et/ou reçoivent, qui pourraient aider les professionnels à mieux faire face à ces situations de la vie quotidienne en détention tout en préservant leur santé et par cela, prévenir d’autres situations ou escalades de VIMC. Car il est à supposer qu’un « surveillant "en santé" devrait être d’autant plus à même d’offrir une relation structurante et constructive aux personnes incarcérées » (Boudoukha et al., 2011).

Mots-clés : Violence interpersonnelle en milieu carcéral, santé mentale au travail, surveillants pénitentiaires.

Références

  1. Boudoukha, A. H., Hautekeete, M., Abdellaoui, S., Groux, W., & Garay, D. (2011). Burnout et victimisations : effets des agressions des personnes détenues envers les personnels de surveillance, L’Encéphale, 37 (4), 284—292, DOI : https://doi.org/10.1016/j.encep.2010.08.006.
  2. Brie, G. & Rambourg, C. (2022). Violence en prison : Analyse théorique et perspectives pratiques. Dossiers thématiques, CIRAP
  3. Brower, J. (2013). Correctional officer wellness and safety literature review. Office of Justice Programs, Washington, URL : https://s3.amazonaws.com/static.nicic. gov/Public/244831.pdf
  4. Ghaddar, A., Ronda, E., Nolasco, A., Álvares, N., & Mateo, I. (2011). Exposure to Psychosocial Risks at Work in Prisons: Does Contact with Inmates Matter? A Pilot Study among Prison Workers in Spain, Stress and Health, 27, 170–176.
  5. Harney, J. & Lerman, A. E. (2021). Clarifying the role of officer coping on turnover in corrections, Criminal Justice Studies, 34 (4), 397-422, DOI : https://doi.org/10.1080/1478601X.2021.1999117
  6. Isenhardt, A. & Hostettler, U. (2020). Inmate Violence and Correctional Staff Burnout : The Role of Sense of Security, Gender, and Job Characteristics. Journal of Interpersonal Violence, 35(1-2), 173–207. Doi: 1177/0886260516681156
  7. Jaegers, L.A., El Ghaziri, M., Katz, I. M., Ellison, J. M., Michael G. V., & Cherniack, M. G. (2022). Critical incident exposure among custody and noncustody correctional workers: Prevalence and impact of violent exposure to work‐related trauma, Am J Ind Med.; 65, 500–511. DOI: https://doi.org/10.1002/ajim.23353
  8. Lavigne, E., & Bourbonnais, R. (2010). Psychosocial work environment, interpersonal violence at work and psychotropic drug use among correctional officers, International Journal of Law and Psychiatry, 33, 122–129, https://doi.org/10.1016/j.ijlp.2009.12.005
  9. Lerman, A. E., Harney, J., & Sadin, M. (2022). Prisons and Mental Health : Violence, Organizational Support, and the Effects of Correctional Work. Criminal Justice and Behavior, 49(2), 181-199. https://doi.org/10.1177/00938548211037718
  10. Moulin, V., & Sevin, A. S. (2012). Souffrance au travail en milieu carcéral : les épreuves de l'exercice professionnel au parloir pénitentiaire. Le travail humain, 75(2), 147-178
  11. Rascle, N. & Irachabal, S. (2001). Médiateurs et modérateurs : implications théoriques et méthodologiques dans le domaine du stress et de la psychologie de la santé, Le Travail Humain, 64 (2), 97-118
  12. Taylor, K-H. & Swartz, K. (2021). Stress doesn’t kill us, it’s our reaction : exploring the relationship between coping mechanisms and correctional officer PTSD. Criminal Justice Studies, 34(4), 380-396, DOI : https://doi.org/10.1080/1478601X.2021.1999116

Principal : Clinique et Processus Cognitifs

Secondaire : Risque et Accompagnement au Changement